Découverte d'une période glaciaire chaude modifiant la cyclicité climatique de la Terre
María Fernanda Sánchez Goñi, directrice d’études à l’École Pratique des Hautes Études, membre de l’Unité Mixte de Recherche Environnements et Paléoenvironnements Océaniques et Continentaux (UMR EPOC), publie les résultats de sa recherche dans le dernier numéro de Nature Communications.
Un changement de cyclicité largement méconnu
Les scientifiques se sont pendant longtemps demandé de quelle façon le climat de notre planète avait basculé il y a 700 000 ans de cycles climatiques long de 40 000 ans aux cycles climatique actuels, d’une durée de 100 000 ans. Une nouvelle étude, impliquant l’EPHE et le CNRS, identifie une période glaciaire « chaude » qui aurait permis l’accumulation des glaces nécessaire à cette importante transition. Ces résultats ont été publiés dans Nature Communications.
Au cours des 700 000 dernières années (ka), notre planète a été soumise à une alternance de périodes glaciaires et interglaciaires marquées s’étendant sur environ 100 ka. Les glaciations sont caractérisées par le développement de grandes calottes glaciaires dans l’hémisphère nord. Avant 700 (ka), le climat de la Terre était régi par des cycles de 40 000 ans avec des glaciations plus courtes et plus faibles. Le passage d’un cycle à l’autre s’est produit à la fin d’une période appelée la Transition du Pléistocène Moyen (TPM), datée entre 800 et 670 ka.
Cette intervalle est composée de deux périodes interglaciaires entrecoupées par une période glaciaire. Les mécanismes expliquant ce changement clé de cyclicité restent largement méconnus car ils ne peuvent être attribués aux variations des paramètres orbitaux régissant le climat de la Terre.
Cette étude aborde cette question cruciale en combinant de nouveaux enregistrements climatiques de la marge sud-ouest de la péninsule ibérique avec des enregistrements de loess du plateau chinois et des simulations de modèles. L’étude identifie une tendance similaire au réchauffement et à l’humidification à long terme dans les deux régions subtropicales entre 800 et 670 ka. Elle révèle que les températures de surface de la mer dans les océans Atlantique Nord et Pacifique Nord tropical étaient paradoxalement plus chaudes pendant la période glaciaire que pendant la période interglaciaire précédente, ce qui a entraîné une augmentation de la production d’humidité et des précipitations, une plus forte expansion de la forêt méditerranéenne occidentale et un renforcement de la mousson d’été en Asie de l’Est.
Cette configuration climatique a entraîné un apport d’humidité océanique des deux océans vers les latitudes plus élevées, ce qui a alimenté les calottes glaciaires et contribué de manière déterminante à l’expansion des calottes glaciaires eurasienne et nord-américaine. Cette expansion était nécessaire pour déclencher le passage des cycles de 40 000 ans aux cycles de 100 000 ans que nous connaissons aujourd’hui, ce qui a été déterminant pour l’évolution du climat de la Terre.
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